LE ZERO HERO, Agit au Vert 2015
D’après Williams Sassine « Le Zéhéro n’est pas n’importe qui »
Interprété par Ibrahima BAH
Mis en scène et adaptation Patrick SERAUDIE
Le Zéro Héros
Ayant déjà monté la première partie du texte de Williams Sassine, l’exil de Camara et son acceptation par les blancs, Ibrahim Bah m’a demandé de travailler sur une adaptation globale du texte, c’est à dire l’exil puis le retour au pays du personnage. Il m’a demandé également de le diriger sur le plateau.
Et je regardai la pluie laver mon pays. Il en avait besoin.
Une chaise, un transistor et une valise accompagne le voyage et les rêves de Camara.
Il retrouve la Guinée, sa famille et ses anciens amis vieillis prématurément sous le climat dictatorial de l’ancien président.
Il se rend vite compte que les régimes changent mais que les habitudes perdurent.
Restent l’humour et la poésie.
La vie.
Et un blues guinéen…
Patrick Séraudie
Le Zéhéro
Après avoir appris la mort du PDG, Sékou Touré, à la tête de la Guinée pendant plus de deux décennies, Camara l’exilé, apparaît sous un regard nouveau auprès de la famille de colons blancs pour laquelle il travaille. Un intérêt soudain se manifeste pour Camara, qui jusque là, homme sans histoire, devient malgré lui la figure d’un héros de l’opposition au régime du PDG. Camara profite du nouveau statut que l’actualité lui confère, et libère tout son refoulé de colonisé, de musulman, se mettant à transgresser allègrement les tabous : alcool, tabac, les femmes …
A travers Camara, le héros zéro de la pièce, une multitude de personnages surgissent pour nous dire leur rêve de liberté, leur hantise d’exilés, leur ivresse de vivre. Récit monologué à la fois humoristique, cynique et caustique, le «Zéhéro» manie le dérisoire et le grave qui s’expriment vaille que vaille avec la même urgence… aucune dictature n’a pu empêcher le rêve ! Plongeon dans les absurdités et les décalages de situations rocambolesques.
La presse
Comme un conteur, Ibrahima porte à la fois la parole narratrice et les brefs personnages qui croisent ce moment très particulier de la vie de Camara. Le comédien est là pour rassembler cette matière très riche : il la déballe avec tant de générosité qu’elle déborderait de partout, n’était la remarquable propreté du jeu. La canalisation est impeccable : des ruptures de tons maîtrisées, une gestion de l’espace qui ferait presque oublier le solo, bref beaucoup de rigueur face à une écriture qui s’offre le plaisir du tout azimut.
Quinze personnages plus loin on en a oublié les premiers, mais peu importe : on ressent la force de ce tourbillon existentiel, quand tout un monde intime vacille sous l’effet d’une simple nouvelle, quand ce vacillement individuel n’est que le symptôme d’un grand chambardement collectif… Le tout avec le rire aux lèvres, alors même que la mort et la misère demeurent clairement à l’horizon.
Manon Ona